Truc d'avant -
Truc d'après
Fleur des yeux
Ce matin, métro, encore embrumé de sommeil, je me laisse porter, Nouvelle Vague dans les oreilles.
Entre une jeune femme, 25 ans tout au plus. Elle porte un jilbab (ou un tchador, je ne suis pas un expert). Son corps disparaît totalement derrière le tissu noir ne laissant apparaître que son visage, sa peau légèrement ambrée, sa bouche joliment dessinée et l'esquisse d'une fossette sur sa joue. Je ne parviens à détacher mon regard de la jeune femme. Contrairement à ce qu'elle pourrait éventuellement imaginer, ce n'est pas sa tenue qui retient mon attention mais sa présence, son aura, son humanité. Peut-être a-t-elle remarqué, senti le poids de mon regard ? Soupçonne-t-elle ce qui me fascine chez elle ? S'imagine-t-elle que je la prend pour une kamikaze ou que je suis heurté par sa foi ? Sur le moment, je suis à mille lieues de me poser des questions intelligentes sur la laïcité ou l'intégration ; je me contente de regarder la jeune femme, son regard qui pétille, virevolte puis se fige dans une expression mélée d'ennui et de sérénité. On dit que le noir va a tout le monde, son costume entièrement noir lui va à merveille. Au delà de sa signification religieuse, sa tenue est un écrin où étincellent ses yeux, sa jeunesse, sa fraîcheur, sa vie. Elle est jolie tout simplement.
Après quelques minutes, la jeune femme se déplace vers un endroit plus confortable. Elle s'assied en face de moi mais un peu plus loin. Je ne la vois plus de la même manière. Son regard a disparu, masqué par la barre métallique horizontale qui prétend être un appuie tête. La jolie voyageuse n'est plus là, elle a disparu. Sur la banquette une étrangère a pris sa place ; son regard n'existe plus. Elle est devenue une femme sans regard, une de celles dont on brouille les yeux à la télévision pour protéger leur sécurité, une de celles dont le salut réside dans la déni, dans l'abandon de ce qu'elles sont, de ce à quoi elles aspirent, une femme sans sourire, une femme sans espoir.
Le contraste est saisissant. La douce beauté s'est tue pour laisser place à l'austérité. C'était dans ses yeux que se trouvait la clé, dans ses éclats que triomphait son humanité.
Sur les dernières minutes du trajet, je n'ai plus croisé son regard. Elle a tourné la tête sur le côté ; à travers la vitre, ses yeux ont longé le canal au fil des tags et des grafs pendant de longues minutes. Curieux dialogue, étrange confrontation entre les expressions éclatantes et multicolores et son mutisme monochrome. Histoires d'humanité. C'est dans les yeux que se trouve la clé.
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ana
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Très jolie perception.
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Vinzzz
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Merci Ana
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Feu
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Je tombe ici, par l'intermédiaire du joueb de Joumana... C'est si, vrai la clef se trouve dans les yeux. Parfois, on dirait que les yeux disent, comme l'écrivait Rimbaud : "J'ai seul la clef de cette Parade sauvage". Les yeux, des portes sur l'âme?
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nanaqui
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Et si ma ante en avait.... Ooooh ! je suis navré, je sors tout de suite...
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kiriaki
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la puissance mystificatrice du chant des sirènes de Nouvelles Vague...
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Vinzzz
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Ne pas confondre vieux tube et nouvelle vague
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à 10:59