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Il y a quelques mois, la propriétaire de mon appartement m'informait de sa décision d'augmenter le montant du loyer. Même si la nouvelle ne m'enchantait que très relativement, elle était dans son droit puisqu'elle se contentait d'appliquer la hausse légale indexe sur le coût de la construction et qu'elle ne l'avait pas fait les années précédentes. Je lui envoyai alors un courrier où je prenais acte de cette augmentation et où j'évoquais des travaux que j'envisageais de faire dans ledit apparement.
En gros, j’avait été convaincu par une amie de reprendre le contrôle de ce logement qui, pour m’avoir bien dépanné, n’en était pas moins une sorte de terrier insalubre et inadapté. Passons sur la localisation au 6ème étage sans ascenseur (oui, je sais, c’est rare pour un terrier) et les toilettes sur le palier, l’appart jouissait également d’une charmante moquette à la couleur improbable, allègrement squattée par des colonies d’acariens poussièrophiles et d’un système électrique datant probablement des toutes premières semaines qui ont suivi l’invention de l’électricité.
Le fin du fin se situait dans la pièce communément appelée
la cuisine-salle de bains. En effet, cette pièce était équipé d’un objet
fantastique, dont la rareté n’avait d’égal que le sentiment d’hilarité
incontrôlable que provoquait son évocation auprès de toute personne normalement
constituée : j’ai nommé…
Cet objet insolite dont les origines se perdent dans les méandres de l’histoire de la plomberie de camping se constitue principalement d’un bac à douche équipé de charnières qui lui permettent de se rabattre contre le mur où un crochet judicieusement placé vient s’accrocher à un anneau, réduisant ainsi à pas grand-chose l’encombrement de l’objet. Jusqu’ici, on se dit qu’il n’y a pas de quoi se plaindre et que tout va plutôt bien. C’est méconnaître la prodigieuse habileté du bricoleur qui s’est occupé de l’installation de la douche. L’homme est une sorte de poète de la plomberie ; il ne se satisfait pas des conventions bourgeoises qui voudraient que, pour s’écouler, l’eau aurait besoin d’une pente. Notre ami décide que la vie manque de sel si l’on n’ajoute pas une dose d’irrationnel alors il décide de mettre en place une contre-pente pour donner un peu de fantaisie à la vie. Ainsi, l’eau ne s’écoule pas mais, au mieux, stagne dans son bac de collecte ou déborde avec majesté sur le sol de la cuisine, transformant ainsi régulièrement la pièce- et c’est la force de la poésie – en une zone de crues, évoquant assez facilement les rives du Nil ou les régions de moussons.
Après avoir supporté un moment, les vicissitudes de
l’installation, je m‘étais résolu à faire intervenir un ami d’ami qui avait
réussi à rendre le système viable, me privant certes de la poésie de la
contre-pente mais me permettant de disposer un peu plus sereinement de ma
cuisine à pied sec.
Dans le courrier à ma propriétaire, j’évoquai donc les
travaux de plomberie déjà effectués, ceux de peinture dont je pensais pouvoir
m’acquitter et la nécessité de protéger, sans doute en le carrelant, le mur
adjacent à la douche qui se dégradait à vue d’œil.
Ladite propriétaire, sans doute trop occupée à recompter les
loyers de ses différents appartements, ne prit pas le temps de me répondre avant
plusieurs mois mais finit par se décider en décrochant son téléphone. Elle m’informa
alors de sa décision d’entreprendre de sérieux travaux dans l’appartement et me
demandait donc de bien vouloir m’organiser pour quitter l’appartement quelques
semaines pour que le chantier puisse commencer. Après m’être assuré qu’elle me
dispenserait de loyer pendant la période et avoir tenté de réfréner ses
velléités de nouvelle augmentation après les travaux, je m’engageai à faire mon
possible pour quitter les lieux dans les meilleurs délais pour laisser le champ
libre aux ouvriers.
Ce que je ne savais pas encore, c’est que l’ouvrier en
question n’était pas un inconnu mais n’était autre que le gendre de ma
propriétaire, mieux connu sous le nom de Plombier-poète et devenu célèbre par
sa maîtrise dans l’art de la contre-pente.
Avec un tel phénomène à l’œuvre, les travaux promettaient
d’être épiques ; ils n’ont pas trahi leur promesse.
La première difficulté a consisté à se mettre d’accord sur
l’organisation et la date de début du chantier. Notre plombier-poète voulait
commencer vite parce qu’on ne sait jamais de quoi demain sera fait, qu’il vaut
mieux tenir que courir et qu’un tiens vaut mieux que deux tu l’auras. Avec des
efforts surhumains, je parvins à lui faire comprendre que j’avais besoin d’un
peu de temps pour m’organiser, trouver un endroit de repli et organiser le
rangement de l’appart en vue de permettre les travaux.
C’était sans compter sur la malchance. En effet, mon ami
avait été tout récemment sollicité par un proche en délicatesse d’hébergement
et avait très logiquement répondu favorablement à sa demande en lui sous-louant
l’appartement. La première solution de repli disparaissait donc, m’obligeant à
contacter notre ami plombier-poète pour l’informer de ma difficulté.
Devant l’insistance pressante du bricoleur, je finis par me
résoudre à sacrifier une semaine de mes vacances estivales pour quitter la
capitale et me libérer de la pression du type. Contre toute attente, ma demande
de congés fut acceptée par ma direction et je parvins donc à organiser ma
semaine en famille. Pour faciliter la vie du bricoleur et comme la perspective
du départ en vacances me mettait de bonne humeur, j’allai même jusqu’à lui
proposer de libérer l’appartement une semaine plus tôt, en mettant en place une
habile stratégie de squattage chez des amis. Je lui annonçai donc pouvoir
quitter l’appartement dès le lundi suivant.
Remis du désagrément de l’intrusion massive d’inconnus dans
mon appartement, je jouai gentiment le jeu, essayant de masquer mon énervement
et mon exaspération devant l’incompétence manifeste du Poète, confondant
allègrement millimètres et centimètres sur ses plans de chantier. Cette vision
n’était pas des plus rassurantes mais l’épouse du Poète, accessoirement fille
de ma propriétaire, tenta néanmoins de me tranquilliser au moyen d’un
« vous allez voir, ça va bien se passer. Il ne travaille peut-être pas
très vite mais il travaille bien ». Elle avait partiellement raison…
Malheureusement…
Ce mercredi, c’était hier… Vers 19h30, accompagnée de ma
meilleure amie dans le rôle du soutien psychologique, je débarquai donc dans
l’appartement. Notre bricoleur préféré s’y trouvait aussi, affairé au dessus du
nouveau bac de douche. Apparemment surpris de nous voir, il nous annonça qu’il
avait un petit problème avec une fuite et commença à se justifier en expliquant
que la douche fonctionnait avant, que c’était la faute du magasin de bricolage
qui lui avait refourgué un mauvais modèle, qu’il lui manquait un joint, qu’il
espèrait réparer ça bientôt, que ce sont des choses qui arrivent, que ce n’est
finalement pas si vital de disposer d’une douche en état de marche même s’il
fait 40 degrés dehors, que l’essentiel c’est d’avoir la santé…
Déterminé à dormir chez moi ce soir là, je décidai de ne pas
me laisser abattre mais le numéro du poète atteignait des sommets. Avec une
mauvaise fois digne des plus grands garagistes ou assureurs, il démontrait à
quel point il avait été efficace et comme j’étais finalement bien exigeant.
Qu’avais-je donc ainsi à vouloir réintégrer un chez moi ? Quel problème
pouvais-je bien avoir qui se manifestait par ce besoin de me retrouver seul ?
Notre ami devenait psychologue et me prodiguait ses conseils et ses sentences.
Je devais apprendre à me contenter de la situation et voir les bons côtés des
choses : tant qu’il continuait à travailler sur le chantier, je pouvais à
loisirs emprunter ses outils. Peut-être même pourrions nous devenir amis s’il
continuait ainsi à me tenir compagnie ? Homme de peu de qualité, que ne
suis-je donc pas capable de m’émerveiller devant ces miracles de la vie ? Quel
funeste sort m’empêche ainsi de me réjouir quand je découvre que le
poète-plombier a réussi à mettre hors service mon installation
téléphonique ? Quelle particularité psychologique me pousse donc à me
lamenter de n’avoir ni douche ni électricité dans la cuisine ? Quel fieffé
citoyen suis-je à trouver ridicule de voir le poète fixer des étagères à
La nuit dernière, un futon fermé et une couette en boule m’ont
servi de lit ; le téléphone et internet sont en rade ; l’électricité dans
la cuisine et la douche ne sont pour l’heure que des hypothèses ; le poète
risque de continuer durablement à pimenter mes journées de sa présence lunaire ;
mon appart est encore un chantier je ne sais toujours pas quand tout se
terminera ; je ne suis pas certain que ça se terminera un jour. Mais bon,
tant qu’on a la santé….
PS : grand merci aux hébergeurs pour leur gentillesse et leur hospitalité, et au poète-plombier pour ses leçons de vie.
Commentaires :
joumana |
Mon pov'Vinzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzz, je compatis!!!!
Demande au plombier qu'il te déclame des poèmes en faisant ses travaux, je pense que ça peut atteindre des sommets...;-)) Bon je rigole, je rigole mais vraiment, je suis désolée pour toi. Répondre à ce commentaire
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Vinzzz 23-06-05
à 15:03 |
En faitEn fait, ça va déjà mieux ; je suis quand même de retour chez moi et puis je commence à prendre l'habitude. Au fait, tu as vu, j'ai écrit un post quasi plus long que les tiens...
Répondre à ce commentaire
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joumana 23-06-05
à 15:36 |
Re: En faitouais grande performance :-)))
comme ça je me sens moins seule avec mes articles-fleuves ;-)) Répondre à ce commentaire
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Tsu 23-06-05
à 16:02 |
Quelle aventure! Et quel langage châtier! J'espère que ça va vite s'arranger...
Puisque tu peux utiliser ses outils, profites-en et balance lui une clé de 12 sur la figure à ce "poète" (à part s'il ressemble à celui-ci, si c'est le cas, pardonne lui tout et donne moi ses coordonnées, que je le présente à mes copines) Répondre à ce commentaire
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Vinzzz 23-06-05
à 16:12 |
Tes copines ne nous le pardonneraient jamais ; non seulemnt, il ne ressemble pas du tout à l'éphèbe polonais mais en plus, il leur ferait vivre l'enfer.
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Cristalpearl 23-06-05
à 16:04 |
Ton article m'a vraiment fait beaucoup rire (malgré toute la compassion que j'ai pour toi) car il m'a rapellé de savoureux épisodes des travaux qui ont eu lieu dans mon appartement il y a quelques mois et pour lesquels j'ai du déployer des trésors d'humour et de bonne humeur... Enfin, quand je ne piquais pas ma crise quand même ;-) Peinture partout sur les meubles, lit au milieu de ma chambre bloquant mon armoire et me permettant tout juste de disposer d'une petite culotte propre chaque jour (enfin, là je me suis battue quand même, il ne faut pas exagérer), impossibilité physique d'accéder à ma cuisine, mise hors service de mon système téléphonique (avec prise remise à l'envers et arrachage des fils -> facture des réparation et de remise ne service France Telecom payée par moi-même) papier arraché autour du porte-manteau mural (au lieu de le dévisser, ce que j'ai du faire moi même), ouvriers arrivés à 7 heures du matin un samedi ou bien m'ayant oublié (déssertion du chantier) et même perte de mes clés. Bref, deux semaines pour des travaux qui auraient du durer 5 jours : bel exploit !!! Donc je compatis, je t'assure :-) Je te souhaite plein de courage et de patience mais tout finira par s'arranger, tu verras. Gros bisous. Cristal Répondre à ce commentaire
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Vinzzz 23-06-05
à 16:19 |
Merci de ton soutien mais je te rassure, tout va déjà mieux depuis que j'ai tretouvé mon toit. Anecdote : je viens d'essayer de joindre le poète sur son portable ; il ne répond pas. Le téléphone fixe sonne dans le vide chez moi ; peut-être a-t'il remis la ligne en service. A la limite, il a peut être même réparé la douche et ne répond pas parce qu'il est dessous. Optmisme, welcome back...
Merci de ton passage et à bientôt Répondre à ce commentaire
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Muche 23-06-05
à 18:11 |
Re:Rire ou pleurer ?
mgnmgnmgnff WAHAHAHAHA !!! Super article Vinzzz, premièrement parce qu'il est drôle, et deuxièmement parce qu'il me donne l'impression de vivre dans le luxe : je ne suis qu'au 5ème (sans ascenceur), et la douche de ma cuisine - salle de bains est fixe ! Permets moi de te dire combien j'admire ta zénitude. Bon courage ;-) Répondre à ce commentaire
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Faustinia 24-06-05
à 14:00 |
Re: pÖv',pôv'VINCEcomme tout le monde, je compatis...tu devrais envoyer ton article à P. PALMADE...il n'aurais pas grand chose à retoucher et ça ferait un superbe sketche !! si tu es encore à la rue, une fois les travaux d'incendie terminés, on pourra te proposer une petite place chez nous..mais c'est peut-être un peu loin pour toi...les amis de jouminette sont nos amis...mais tu te douches avant de venir !! :o)) Répondre à ce commentaire
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Vinzzz 28-06-05
à 08:53 |
Merci de ta proposition mais ça devrait enfin aller...Aux dernières nouvelles, j'ai de nouveau l'électricité et le téléphone. Comble du luxe : la douche fonctionne même ! Petits détails : l'eau chaude et l'eau froide sont installées de façon aléatoire à droite ou à gauche sur la douche et l'évier ; il va falloir s'y habituer... Notre ami poète a même daigné poser une étagère que je réclamais à corps et à cris dans la cuisine. Bémol : l'étagère fait la moitié de la taille prévue et ne devrait pouvoir porter que le micro ondes. Soyons positif, ça aura l'air sympa un four sur la table de chevet
Répondre à ce commentaire
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Katja 23-06-05
à 23:01 |
Alors là obligé on a le même plombier! Il a bossé un mois et demie sur la salle de bain pour des travaux prévus sur "maximum deux semaines hein". Pendant ce temps tout était déménagé dans ma chambre (déjà que d'hab elle est pas rangée...). En plus on lui donnait mes clés donc je manquais à chaque fois d'être à la porte, et il était d'une ponctualité inimitable ("je viens demain à 9h!" et le lendemain à 12h, il se pointe (on l'attendait) "je vais manger un sandwich je reviens dans 15min" et il revient ... au bout de deux heures). Ou du genre ma mère a autre chose à faire mais elle revient 4 fois dans la journée à la maison pour lui donner les clés parce qu'il est censé venir le jour même. Mais forcément il est pas là. Elle l'appelle sur son portable mais il ne répond pas, etc. En plus la SDB elle est pas finie et elle est moche. Alors voilà, ma chambre a été insalubre pendant 1 mois et demie, ils mettait sa musique pourrie à fond, il ouvrait pas la porte et ne répondait pas à l'interphone quand j'étais à la porte alors je compatis, frangin. Répondre à ce commentaire
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LePresident 24-06-05
à 07:48 |
Salut Vinz
Ta grande aventure me rappelle une expérience similaire en terme d'incompétence et de mauvaise fois.;-) En tout cas je te souhaite bon courage et n'abuses pas sur les Témestas. Répondre à ce commentaire
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Chewkapac 24-06-05
à 15:15 |
un vrai bonheur de lecture :) allez, il te reste les piscines publiques , c'est pas trop cher, et y a des douches ! Répondre à ce commentaire
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sarah-k 28-06-05
à 15:58 |
Que te dire (hi hi hi hi hi hihi )
Si tout devait s'écrouler entre le 15 et le 30 juillet, je te passe la clef de Place-des-fêtes. Répondre à ce commentaire
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Moishe 29-06-05
à 10:24 |
CourageSalut VinzzZ ! Répondre à ce commentaire
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Anonyme 29-06-05
à 14:23 |
Lien croiséVoyage et Plomberie : " En fait il est un peu tarte et il est même pas plombier! Merci Ysengrin de nous remettre sur le bon chemin :-))D'autres histoires de plombiers chez Vinzzzzzzzzzz."
Répondre à ce commentaire
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à 14:58