Ca commence à être une habitude, en espérant que ce ne soit pas déjà une addiction...

J'ai l'impression de ressentir ce qu'éprouvent des parents à la naissance de leur premier enfant, une évidente nécessité, une responsabilité. Ce joueb n'existe que par moi, il n'a rien demandé à personne, n'a pas demandé à vivre (spéciale dédicace à toi l'adolescent qui te reconnaîtra dans ces mots), c'est donc à moi d'assumer mon choix, mon désir de joueb.
Trouver le sens de la vie est peut être voué à l'échec, trouver le sens de ce joueb, il faudra s'y employer tous les jours.
Le téléphone a retenti tout à l'heure pour m'annoncer l'exceptionnelle nouvelle. Le téléphoniste a été formel malgré l'émotion légitime que j'entendais dans sa voix : j'ai été sélectionné parmi les habitants de mon arrondissement (ma chance est insolente) et j'ai gagné deux cadeaux phénoménaux : une montre pour moi et une assiette en porcelaine de Limoges pour mon épouse. La seule condition était de me rendre à la boutique organisatrice pour y recevoir mon trésor sans obligation d'achat, en compagnie de mon épouse. Et c'est là que le bat blesse.
En effet, je suis célibataire, tout ce qu'il y a de plus célibataire. Par honnêteté, je n'ai pu la cacher au téléphoniste (même si évidemment, ça a été une torture que d'admettre publiquement ma sinistre condition) et tout s'est soudain effondré. Le jeune homme m'a renvoyé à mon funeste destin : en tant que célibataire, je suis d'office exclu du concours et mes cadeaux ne me seront pas remis. Que la vie est dure parfois ! La société me stigmatisait déjà et il n'était déjà pas rare qu'on ironise, qu'on se gausse, qu'on se moque de ma situation familiale, pas rare que des couples légitimes se retournent sur mon passage pour me jeter la première pierre de l'opprobre de la société, pas rare que ma mère m'exprime son désappointement et son inquiétude, me voilà aujourd'hui victime d'un nouvel ostracisme : on m'a volé MON assiette en porcelaine de Limoges. Comme je l'imaginais déjà trôner au milieu de ma table accompagnée de mes verres à moutarde et mes couverts en plastique... Ce récent rêve de ma vie s'est effondré, j'aurais sans doute du mal à m'en remettre...
D'un coup, je me sens en pleine fraternité avec Yacine Lerari, cet Algérien résidant à Toulouse depuis une dizaine d'années, vainqueur de la "course de l'ail" qui s'est vu refuser le premier prix, un billet aller-retour pour la Réunion parce qu'il n'était pas français.

Sus aux discriminations ! Justice pour tous ! Même sol, mêmes droits ! Chirac en prison !

Adieu assiette en porcelaine de limoges, tu vas me manquer...