Le 4 mars dernier, lors de sa visite marathon au Salon de l'Agriculture, Jean-Pierre Raffarin déclarait à des enfants : «Vous voulez boire du lait à l'école ? Je suis d'accord avec vous, il faut en boire.»

La veille, l'Agence française de la sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) présentait pourtant un rapport expliquant que la collation distribuée le matin en classe «est à l'origine d'un excès calorique qui ne peut que favoriser l'augmentation de la prévalence de l'obésité constatée depuis trente ans chez les enfants d'âge scolaire en France». L'AFSSA désigne le risque de «générer des attitudes favorisant le grignotage» et estime que la distribution de lait "n'est pas justifiée" non plus. "Il n'existe pas d'insuffisance d'apport calcique au sein de la population concernée par la collation du matin", note l'AFSSA, en soulignant que "les collations à base de lait représentent une part trop importante de la ration calorique journalière".

Cet intérêt pour la distribution de lait à l'école est une tradition familiale chez les Raffarin. En effet, c'est le père du Premier Ministre, Jean Raffarin, éphémère secrétaire d'état de Pierre Mendès France, qui est à l'origine de la distribution de lait dans les écoles en 1954. Jean Raffarin était également le fondateur de la coopérative laitière Boni-Lait. Aujourd'hui, Jean-Pierre Raffarin lui a succédé comme président de l'Association centrale des laiteries. 
De là, à dire que les Raffarin favorise la distribution de lait en milieu scolaire pour satisfaire les intérêts de la filière lait (voire leurs intérêts personnels), il n'y a qu'un pas.

La famille Raffarin n'est pas la seule impliquée dans cette distribution. Son principal promoteur n'est autre que la multinationale Tetra Pak via son programme prétendument pédagogique "Le Lait à l'école".
Sur son site http://srvlinux.dyndns.org/tetrapak/attente/attente_lae.htm, Tetra Pak propose aux parents, aux enseignants et aux enfants eux-mêmes de lancer des opérations autour du lait dans les établissements scolaires.
Tetra Pak n'hésite pas à présenter tous les avantages du lait à l'école : "La malnutrition favorise l'échec scolaire, le manque de civisme, la violence et l'inégalité. La distribution de lait à l'école lutte contre ces fléaux."
Comment, avec de tels arguments, pourrait-on, sans passer pour un mauvais citoyen, empêcher l'accès à l'école des kits pédagogico-publicitaires de la multinationale ?

Autre intervenant, l'association Amalthée de promotion de la distribution de lait à l'école a mis en doute les bases scientifiques de l'enquête de l'AFSSA. Son comité scientifique avait conclu en septembre à la nécessité de maintenir la collation. Peut-être n'est pas inutile de préciser que la responsable de l'opération "Le Lait à l'école" chez Tetra Pak est membre de ce comité prétendument scientifique,qui a pour objet de "fédérer des compétences reconnues afin de renforcer la place du Lait à l’école et de démontrer sa valeur sanitaire, nutritionnelle et sociale."
Curieuse vision de la science qui fixe a priori les conclusions de ses recherches.

Suis-je en train de dire que des industriels feraient passer leurs intérêts économiques avant la santé des enfants ?
Ca se pourrait bien, en effet. Surtout après avoir lu ces quelques lignes dans un rapport de l'Association Amalthée :

"En 2002, 4,8 millions d’élèves ont bénéficié du programme « Lait à l’école », ce qui

représente une consommation de 29 millions de litres de lait liquide (comprenant les

yaourts) et de 12 millions de kilos de fromages.

La France est le premier marché européen de la distribution de lait à l’école avec 23 % de la consommation communautaire."

Ce n'est pas moi qui parle de "marché" et y sacrifie des enfants.
Ce n'est pas moi non plus qui conditionne les enfants en leur imposant un matraquage publicitaire sous couvert d'éducation à la santé.
Pas moi qui trouve dans les écoles des débouchés possibles pour une filière industrielle.

Les industriels ne font que peu d'efforts pour s'en cacher, il était temps qu'on en parle.