Truc d'avant -
Truc d'après
Histoires de nuages
--> un conte
Enfant, j’ai toujours posé beaucoup de questions. Il fallait que je comprenne. Apparemment, les adultes savaient. Ils pouvaient ma répondre. Je comptais sur eux pour m’expliquer tout ce qui se produisait autour de moi. Je posais des questions. Je voulais comprendre. Parfois les réponses étaient évidentes, d’autres fois je voyais bien que mes parents étaient embarrassés et qu’ils ne savaient pas quoi dire. Je regardais autour de moi. Tout me semblait curieux, étrange.
Depuis toujours, j’étais fasciné par le ciel. J’y avais observé des phénomènes incroyables. Après la pluie, je voyais parfois se dessiner un arc multicolore. Il s’étendait à l’horizon puis disparaissait sans un bruit. La nuit, une multitude d’étoiles s’allumait et éclairait doucement ma chambre les nuits d’été, quand on laissait les volets ouverts. Toutes ces lueurs m’émerveillaient. J’y voyais des soleils, des lampes magiques, des lucioles fantastiques. Quand je me réveillais, les étoiles avaient disparu. Elles avaient cette curieuse habitude de fuir le jour, de ne se montrer que la nuit. J’y percevais de la timidité, une fragilité qui leur faisait craindre l’éclat trop violent du soleil.
Dans le manège du ciel, je m’intéressais aussi aux nuages. J’aimais leur ballet. J’aimais comme le ciel pouvait s’emplir doucement de coton, comme il devenait un terrain de jeux pour ces colosses moutonneux, ces géants fragiles et délicats.
Je n’avais aucune idée d’où pouvaient venir les nuages. J’avais interrogé mes parents à ce sujet, mais j’avais bien compris qu’ils n’avaient pas de réponse satisfaisante à m’apporter. Je les sentais gênés, confus, perplexes. Apparemment, ils ne le savaient pas. Je décidai donc de me faire une idée par moi-même et je commençai à me plonger dans le ciel, en quête de la clé du mystère.
Un événement se produisit qui me mit sur la voie. Le jour, de mes 6 ans, une fête avait été organisée en mon honneur dans le jardin familial. C’était la première fois qu’il m’était permis d’inviter quelques camarades. C’était ma fête, mon grand jour. Je n’avais qu’une crainte : si le temps était trop mauvais, mes parents prévoyaient d’annuler les réjouissances et de les reporter à une date plus clémente. Ça n’était pas possible. Je le savais, c’était la dernière fois que je pouvais inviter la douce Joanne dont j’étais secrètement amoureux. Quelques jours plus tard, elle partait avec ses parents à l’assaut de la Méditerranée et je n’étais même pas sûr de la retrouver à la rentrée. Il fallait que le temps se prête à mes projets, que le soleil accepte d’être mon allié.
Dès mon réveil, j’inspectai le ciel à la recherche d’éventuels nuages susceptibles de gâcher ma fête et ma vie sentimentale. Apparemment, tout se présentait bien ; le ciel était parfaitement bleu et je n’avais rien à craindre des éléments. Pourtant, quelques minutes plus tard, le drame tant redouté semblait sur le point de se produire. Un nuage tout rond se précipitait à toute allure en direction du soleil, apparemment bien décidé à le faire disparaître. Cette seule idée me glaçait et je sentais déjà mes rêves se volatiliser. Mes parents allaient annuler la fête, je ne verrais pas Joanne et elle partirait dans le Sud sans m’avoir embrassé, tomberait, là-bas, amoureuse d’un autre et ne reviendrait plus jamais dans nos contrées tristes et nuageuses.
Je ne parvenais pourtant pas à me faire à cette idée. Il fallait que je trouve une solution. Je regardai le nuage rond de toutes mes forces et essayant de le convaincre d’annuler ses sombres desseins. Plus je me concentrais et plus j’avais l’impression que ma lutte pouvait servir à quelque chose. Le nuage rond semblait dévier sa course, comme s’il acceptait de changer ses projets pour me satisfaire. Je n’osais pas vraiment y croire, mais après tout, ce n’avait que peu d’importance. L’essentiel était désormais acquis : le nuage rond ne s’attaquerait plus au soleil, il semblait s’être rangé à mes arguments et me faisait le cadeau de sa clémence.
Quand Joanne pénétra dans le jardin, le nuage rond m’avertit immédiatement de sa présence. Il se transforma doucement, prenant la forme d’un cœur. Je ne pus m’empêcher de sourire et je rougis un peu en comprenant que le nuage n’ignorait rien de mes élans. Plus tard, beaucoup plus tard dans l’après-midi, lorsque je me retrouvai seul avec Joanne sous le pommier familial, à l’abri des regards, mon ami nuage me donna la force de m’approcher d’elle et de déposer un baiser sur ses lèvres. Je me sentais fort, soutenu par un allié hors du commun. Si le ciel était à mes côtés, rien de fâcheux ne pouvait m’arriver. Joanne ne savait rien de l’histoire de mon nuage. Je ne sentais pas utile de la lui raconter, de peur qu’elle ne me croie pas ou qu’elle pense que je mentais pour m’attirer ses faveurs. J’étais aux anges : j’avais osé embrasser Joanne et j’avais un ami dans le ciel.
Dans les jours qui suivirent, je passai mes journées, les yeux au ciel à observer, analyser le mouvement des nuages, à essayer de comprendre leur nature, leurs intentions. À force de persévérance, je commençai à avoir des réponses.
Les nuages que l’on voit sont toujours les mêmes. Ils tournent autour de la terre et reviennent toujours là où ils sont passés. On peut les voir évoluer, grandir, changer au fil du temps.
Quand un nuage passe, en se concentrant, on peut lui donner une nouvelle forme. C’est quasiment imperceptible. Il faut être patient, très patient, mais on peut les modeler au gré de ses envies. Souvent les nuages disparaissent avant qu’on ait fini de les sculpter mais ils reviennent toujours, alors on peut reprendre son travail au passage suivant.
Parfois, plusieurs personnes, à différents endroits du monde, façonnent le même nuage, unies par une même volonté. Ce sont les plus beaux nuages, ceux qui naissent du désir de plusieurs.
Depuis que j’ai compris que l’on peut modeler les nuages, je m’entraîne. Ma première réussite a été un lapin. Plus vrai que nature. Très satisfait de mon œuvre, je m’étais amusé à lui faire plier une oreille pour faire signe, pour dire bonjour, pour dire qu’il était prêt. Mon lapin avait plié l’oreille, m’avait regardé puis s’était élancé. Je n’aurais pas imaginé qu’il puisse être aussi rapide. Il s’était allié à une bourrasque et avait disparu d’un bond. Je n’en croyais pas mes yeux. Il était déjà loin. J’étais très fier et même pas triste de voir disparaître mon nouvel ami. Je savais qu’il reviendrait après son tour du monde. Et qu’il aurait plein de choses à me raconter. Il aurait sans doute changé, sous les douces caresses de ceux qui auraient reconnu leur lapin. Je l’imaginais flotter au-dessus des montagnes, traverser les océans, faire courir son ombre sur des plaines ensoleillées. Mon lapin existait. Le nuage s’y était reconnu. J’étais un magicien. J’avais fait sortir un lapin du chapeau. Pour la première fois, j’avais dessiné dans le ciel.
(A suivre)
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Valaxaur
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Vinzzz, votre conte est bon. Je ne veux pas attendre que le lapin ait fini son tour du monde avant d'en connaître la suite. Alors retournez votre tête vers les nuages et donnez moi, s'il vous plaît, de nouvelles histoires du ciel et de la terre... ;-)
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Vinzzz
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Bientôt la suite (enfin, j'espère mais ça ne dépend pas que de moi...)
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tgtg
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je regarde les nuages et j'imagine..............
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Vinzzz
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On voit quoi par ta fenêtre ?
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tgtg
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à l'instant le ciel est "tout blanc" ..........
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Vinzzz
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Il va falloir me ranger un peu ce ciel
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PapillonLea
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je sais t'es over booké mais et la suiiiiiitte?!
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Vendredi
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Joli, ce conte... (sourire...) Bise ! ;-)
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à 11:55